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Post by Doudou on Apr 14, 2005 6:32:46 GMT -5
Colère contre un texte de loi qui prévoit une réécriture du passé français. Des historiens en guerre contre la colonisation «positive»
Par Didier ARNAUD
jeudi 14 avril 2005 (Liberation - 06:00)
Les historiens ont tiré les premiers. Car c'est leur discipline qu'on insulte. Ils sont plus d'un millier à avoir signé : «Colonisation, non à l'enseignement d'une histoire officielle». La semaine dernière, l'appel s'est élargi et dénonce le «mépris de l'histoire et des victimes». Hier, lors d'une conférence de presse à la Ligue des droits de l'homme, historiens et personnalités de la société civile sont venus redire tout le mal qu'ils pensent de ce «mépris». Celui-ci est contenu dans la loi du 23 février 2005 sur la «reconnaissance de la nation et la contribution nationale en faveur des Français rapatriés» (Libération du 26 mars). Elle prévoit que «les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, et accordent à l'histoire et aux sacrifices des combattants de l'armée française issus de ces territoires la place éminente à laquelle ils ont droit».
«Activistes». Ce rôle «positif» ne passe pas. Pour Henri Alleg, les époux Aubrac. Mais aussi pour Guy Bedos, Patrice Chéreau, le philosophe Etienne Balibar ou le syndicaliste Gérard Aschieri (FSU). Avec eux, des sommités comme Pierre Vidal-Naquet (lire ci-dessous). «Cette loi apparaît comme un règlement de comptes, c'est une instrumentalisation et une exploitation du passé», explique l'historien Claude Liauzu, qui a beaucoup oeuvré pour que cette mobilisation prenne forme. «Derrière cet article, il y a un groupe d'activistes qui a réussi à imposer son point de vue sur la guerre d'Algérie. Cela nous annonce de nouvelles agitations qui vont jusqu'à la repentance. On trouve les relents des activistes de la guerre d'Algérie et un parfum de l'OAS.»
Ce texte contient aussi des dangers pour la société d'aujourd'hui. Gérard Noiriel évoque cette «confiscation» de l'histoire. Mettre l'accent sur les aspects positifs de la colonisation, c'est, pour lui, «contribuer au sentiment d'humiliation qui risque d'accentuer le repli sur soi. Cela va à l'encontre de la politique d'intégration». Lui, il parle de «sauver la recherche scientifique».
Un des dangers de cette loi «c'est de ne plus avoir besoin d'historiens, de les pousser à mettre la clé sous la porte», selon les mots de Gilbert Meynier. Cette loi «inepte et stupide»va susciter des «âneries symétriques». Et, en plus, elle brise la dialectique. «Toute injonction officielle est contraire à l'esprit historien», dit Meynier.
«Glaciation». Avec Mohamed Harbi, le sujet s'est un peu élargi. «Depuis des années, on travaille à un dégel pour faire l'histoire ensemble, entre Français et Algériens. Cette loi vient au secours du parti de la glaciation», a-t-il simplement dit. D'un point de vue «strictement juridique», Thierry Le Bars a enfoncé le clou. Il a souligné combien cette loi posait le problème de la «compétence du législateur». Ce dernier ne peut empiéter sur le contenu des manuels scolaires. «Il n'est pas là pour dire l'histoire mais pour poser des règles.» Le Bars cite la loi Gayssot sur le négationnisme, ou la loi Taubira sur la traite et l'esclavage. Ces faits ont «existé». Mais, a-t-il conclu, «il n'est pas évident du tout que le rôle de la colonisation ait été positif». Et dans un point de vue (1), il écrit : «Je repense à ce qu'a été la colonisation, au statut juridique indigne des musulmans d'Algérie, aux massacres de Sétif en 1945 (2), à tous ces malheureux qui, jusqu'en 1848, ont vécu l'enfer de l'esclavage pour assurer la prospérité de nos îles à sucre.»
(1) Recueil Dalloz 2005, n° 12. (2) Le 27 février dernier, la France, par l'intermédiaire de l'ambassadeur de France à Alger, a reconnu pour la première fois sa responsabilité dans ce drame.
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Post by Doudou on Apr 14, 2005 6:35:14 GMT -5
Pierre Vidal-Naquet, historien, contre l'intervention du législatif dans les programmes : «L'Etat n'a pas à dire comment enseigner l'histoire»
Par Hervé NATHAN
jeudi 14 avril 2005 (Liberation - 06:00)
Pierre Vidal-Naquet, 85 ans, est historien, spécialiste de la Grèce antique. C'est aussi un homme engagé, en particulier contre les guerres coloniales.
Une loi prescrit d'enseigner la colonisation de manière «positive», qu'en pensez-vous ?
Au Japon, une loi définit le contenu de l'enseignement historique, et les manuels scolaires minimisent la responsabilité des Japonais dans les massacres de la guerre sino-japonaise. Si la France veut faire comme le Japon, il n'y a qu'à continuer dans cette voie. Cette loi me rappelle les «taches roses» qu'on trouvait sur nos cartes de géographie, lorsque le domaine français, au Maghreb, en Afrique noire, en Indochine, signifiait la puissance coloniale de notre pays.
Il n'est pas indifférent de remarquer que les parlementaires qui ont porté la loi de février 2005 sont issus de circonscriptions où les pieds-noirs sont nombreux. Les organisations des rapatriés d'Algérie ont toujours idéalisé la coexistence entre Français et Algériens avant l'indépendance. Or ces deux populations étaient étanches et vivaient superposées.
Si ce n'est pas à la loi de dire l'histoire, que penser de la loi Gayssot qui interdit de professer des contre-vérités concernant le génocide des juifs ?
Je vomis les négationnistes. Mais j'ai toujours été contre la loi Gayssot. Ce n'est pas à l'Etat de dire comment on enseigne l'histoire. On peut comprendre une telle loi en Allemagne, mais en France elle est inutile.
A l'inverse, le débat monte sur l'enseignement de l'esclavage, jugé insuffisant...
Je n'ai aucun doute sur le caractère criminel de l'esclavage. Il faut évidemment l'inclure dans les programmes, mais je ne vois pas ce qu'ajoute sa reconnaissance officielle comme crime contre l'humanité. Tout ce qui ressemble à une histoire officielle est pernicieux. Si l'on pense à Napoléon, il est celui qui a rétabli l'esclavage en 1802. Mais, pour certains, c'est aussi le «Robespierre à cheval», décrit par Germaine de Staël. C'est un mythe, mais les mythes font partie de l'histoire des nations. C'est le travail des historiens de les analyser. Ils font partie de la vie des gens, comme l'esclavage.
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Post by Ornella on Apr 14, 2005 8:53:40 GMT -5
Alain Vidal, professeur des Ecoles école La Fraternité, 44 000 Nantes vidal.mothes@wanadoo.fr 08 71 35 65 89
Nantes, le 7 Mars 2005
Au ministre de l’Education Nationale, Objet: Ce négationnisme d'Etat qui défigure et déshonore l'enseignement de l'Histoire (voir document joint)
J’imagine que vous désapprouvez les propos négationnistes de Jean Marie Le Pen concernant les fours crématoires et l’occupation allemande. Mais pour être porteuse de sens, la réprobation ne saurait se limiter à dénoncer un négationnisme plutôt qu’un autre. Pour se construire, pour ne pas reproduire les crimes du passé, la jeunesse a besoin d’un enseignement de l’Histoire qui ne fasse pas passer pour glorieux faits d’armes des entreprises qui ne relèvent que du crime organisé au plus haut sommet de l'Etat, au prétexte que cet Etat ait été celui de la France. Si nous voulons que ces jeunes ne deviennent pas un jour des bourreaux tortionnaires et assassins, comme l'ont été certains de leurs aînés, encore faut-il que ce négationnisme d'Etat, destructeur de sens moral, cesse d'agir comme un facteur d'impuissance de conscience. Une réécriture des programmes qui président à l’enseignement de l’Histoire est inéluctable. N’abandonnons pas ce travail de mémoire aux générations futures. « Qui ne condamne pas le crime autorise son retour. » Alain Vidal
Copie : Le recteur de l'Académie de Nantes L’inspecteur d’Académie de la Loire Atlantique L’inspecteur de l’Education Nationale, Nantes Ouest
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Post by Ornella on Apr 14, 2005 8:55:31 GMT -5
CE NEGATIONNISME D’ETAT QUI DEFIGURE ET DESHONORE L'ENSEIGNEMENT DE L’HISTOIRE
D'un côté, Jean Marie Le Pen et ses propos négationnistes relatifs aux fours crématoires et à l'occupation allemande, de l'autre, des députés de la majorité gouvernementale qui, le 5 mars 2003, déposent une proposition de loi négationniste qualifiant d’œuvre positive, la présence française en Algérie. Pour un négationnisme condamné, combien d’autres sont ainsi approuvés. Que ces députés viennent donc raconter aux élèves, l’oeuvre positive du bon docteur Bodichon, républicain modéré, collaborateur de Ledru-Rollin, de Waldeck-Rousseau et de Louis Blanc qui affirmait, « si au lieu de cette race [les Arabes] qui outrage la nature et l’humanité par son état social… il n’y en avait pas…,la nature et la civilisation y gagneraient…»Ce médecin très influent pouvait défendre impunément et publiquement la thèse de l’extermination des Arabes dans des journaux qui, en 1848, étaient pourtant soumis à la censure ! Et dans le journal catholique, l’Observateur de Neustrie, on lisait : « N’a-t-on pas le droit d’exterminer les Algériens, comme on détruit par tous les moyens possibles, les bêtes féroces ?» Fort de ces appels au meurtre, le maréchal Clauzel pouvait annoncer le premier massacre collectif, celui de Blida : « J’ai ordonné aux bataillons de détruire et brûler tout ce qui se trouve sur leur passage…Quand on fait la guerre, ce n’est pas pour augmenter l’espèce humaine.»Que ces députés viennent donc raconter aux élèves, l’oeuvre positive du général Bernard, ministre de la guerre qui, en 1838, affirmait: « Refouler, exterminer les populations, ravager, incendier les moissons, étaient les seuls moyens…»Malgré les cas de conscience de certains officiers, comme le général Duvivier qui constate tristement que « depuis onze ans, on a détruit, incendié, massacré hommes, femmes et enfants avec une fureur toujours croissante », pas moins de 900 000 Arabes furent exterminés entre 1830 et 1871, sur les 3 000 000 que comptait l’Algérie. Que ces députés viennent donc raconter aux élèves, l’oeuvre positive du lieutenant-colonel de Montagnac qui écrit dans lettres d’un soldat d’Algérie : « Voilà comment il faut faire la guerre aux Arabes. Tuer tous les hommes jusqu’à l’âge de quinze ans, prendre toutes les femmes et les enfants, en charger les bâtiments, les envoyer aux îles Marquises ou ailleurs; en un mot anéantir tout ce qui ne rampera pas à nos pieds comme des chiens...Toutes les populations qui n’acceptent pas nos conditions doivent être rasées, tout doit être pris, saccagé ;sans distinction d’âge, ni de sexe ; l’herbe ne doit plus pousser où l’armée française a mis le pied.» Ce qui fait dire au général de Brossard : « devant les populations détruites, la terre couverte de ruines, les champs rendus incultes, il faut le dire, la France devra rendre raison. » Mais la France ne rendit pas raison car en 1965, les cendres de ce héros, furent transférées au fort de Vincennes, dans le Tombeau des braves … Que ces députés viennent donc raconter aux élèves, l’oeuvre positive du bon général Bugeaud qui planifiait méthodiquement la destruction des cultures par arrachage des oliviers et des figuiers, par empoisonnement des puits. Ce bon général Bugeaud qui organisait systématiquement le massacre des populations civiles par le sabre et par le feu, ou qui, par commodité, ordonnait tout simplement de « fumer les Arabes comme des renards » en les murant au préalable dans des grottes pour mieux les gazer en les enfumant…Des tribus entières furent ainsi rayées de la carte. Dans les salons, Bugeaud se vantait: « C’est la guerre continue jusqu’à extermination…Il faut fumer l’Arabe ! » Que ces députés viennent donc raconter aux élèves, ces marches de la mort, comme celle de 1846, où, sur 7000 Arabes, 4 000 moururent d’épuisement sur le bord du chemin, 3 000 seulement arrivant à Maison-Carrée. Que ces députés viennent donc raconter aux élèves la torture de masse qui avait pour objectif, en terrorisant la population, de voler les terres les plus fertiles aux indigènes. Appliquée méthodiquement et souvent publiquement, la torture pour faire parler, la torture pour terroriser. L’Arabe mort, cela ne suffit pas, le processus de destruction continue, son corps est mutilé, décapité, exposé sur la place publique, «utilisé comme un instrument de terreur» pour consolider la hiérarchie raciale et coloniale. Que ces députés viennent donc raconter aux élèves, les nombreuses mosquées détruites ou transformées en églises, les cimetières profanés, les squelettes utilisés pour remblayer les routes, ou pour servir d'engrais dans l’agriculture. A Marseille, les os des musulmans en provenance des cimetières d’Algérie serviront au raffinage du sucre. Œuvre positive d’Alexis de Tocqueville, considéré encore aujourd’hui comme le champion de l’idéal démocratique, et qui, pour défendre l’armée française dont les méthodes criminelles étaient déjà condamnées par des humanistes, affirme à l’Assemblée nationale : « qu’il s’agit de multiplier les opérations destinées à anéantir les fondements des sociétés pastorales et agricoles de l’Algérie…de brûler les moissons, vider les silos et enfin s’emparer des hommes sans armes, des femmes, des enfants.»lus tard, mais bien trop tard, il regrettera ces propos, en constatant que ces procédés ont rendu «la société musulmane beaucoup plus misérable, plus désordonnée, plus ignorante et plus barbare qu’elle n’était avant de nous connaître. » Que ces députés viennent donc raconter aux élèves, l’oeuvre positive du sociologue Gustave Le Bon pour qui, en 1884, « l’humanité est entrée dans un âge de fer où tout ce qui est faible doit facilement périr », sans oublier l’oeuvre positive de Charles Richet, prix Nobel de médecine, revendiquant, au début du XX siècle, l’élimination des races inférieures et des anormaux. L’oeuvre positive de Arthur Girault, professeur de Droit, de réputation internationale, qui se prononçait pour l’euthanasie des moins doués. L’œuvre positive de l’économiste Leroy-Beaulieu qui théorisait le concept d’espace vital. Il faudrait que ces députés viennent raconter aux élèves, l’oeuvre positive de Jules Ferry, apôtre de la colonisation, qui, pour couvrir ces atrocités et légitimer la recherche du profit, déclarait à l'Assemblée Nationale, le 25 juillet 1885 : « Les races supérieures ont un droit vis à vis des races inférieures. Elles ont le devoir de civiliser les races inférieures… La politique coloniale est fille de la politique industrielle. »Et Clémenceau de l'interpeller: "Regardez l'histoire de la conquête de ces peuples que vous dites barbares, et vous y verrez la violence, tous les crimes déchaînés, l'oppression, le sang coulant à flots, et le faible opprimé, tyrannisé par le vainqueur. Voilà l'histoire de notre civilisation…Non, il n'y a pas de droit des nations dites supérieures contre les nations inférieures…n'essayons pas de revêtir la violence du nom hypocrite de civilisation. » Jules Ferry fut un propagandiste des plus zélés de l'espace vital et de l’inégalité des races, concepts dont les origines ne sont pas à rechercher chez les Nazis en Allemagne, mais bel et bien en France sous la troisième République. République qui, déjà, était traversée par un fort courant anticolonialiste et humaniste contredisant en quelque sorte la thèse de l’unanimisme supposé de l’époque, thèse si souvent véhiculée de nos jours et visant à exonérer de leurs crimes, ces hommes qui firent la grandeur de la France. Que ces députés viennent donc raconter aux élèves, cette oeuvre positive de la troisième République que fut le Code de l’indigénat, monument de racisme d’Etat théorisé et promulgué le 20 mars 1881 sous la houlette du président du conseil Jules Ferry. Œuvre positive, ce Code de l’indigénat soumettant les Arabes sur le territoire français (depuis 1848, l’Algérie faisait intégralement partie de la France) à un arbitraire qui fut la règle jusqu’en 1944, mais qui, dans la réalité, perdura jusqu’en 1962. Au nom de la mission civilisatrice de la France, ce Code officialisait l’anéantissement de la personnalité juridique de l’Arabe, par l’internement administratif, mais aussi l’anéantissement de l’intégrité de la personne physique par la concentration en camp. Sans oublier l’amende collective et le séquestre des biens, dépossédant les indigènes au profit des colons. Œuvre positive, ces déportations d’Arabes, à fond de cale, vers Cayenne, haut lieu d’extermination par le travail…la durée de vie n’y excédant pas un an. Que ces députés viennent donc raconter aux élèves l’oeuvre positive de Petit Jean, ce manuel scolaire utilisé pendant près de quarante ans par les instituteurs de la troisième République, et dans lequel, à propos des Arabes, on fait dire par un petit garçon : « Quelle honte ! Comment ne faisait-on pas la guerre pour exterminer cet abominable peuple ! »
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Post by Ornella on Apr 14, 2005 8:56:18 GMT -5
Et que penser de ces programmes d’Histoire 2002, pour l’école élémentaire, rappelant que:« La République [la troisième] s’installe durablement, consolide les libertés fondamentales et développe l’instruction…» tout en niant superbement les lois racistes en vigueur, à l’époque, sur le territoire français ? Les bons esprits rétorqueront que le racisme anti arabe, comme l’antisémitisme, était dans l’air du temps, et que depuis les esprits ont évolué. Mais alors comment se fait-il qu’il y ait pléthore de bâtiments publics, de rues ou d’avenues du nom de Jules Ferry, du nom du général Bugeaud…, alors que, et fort heureusement, aucune rue ou avenue, aucun établissement public, aucun lycée ou collège ne portent aujourd’hui le nom d’hommes politiques, d’officiers ou d’intellectuels antisémites de l’époque? Accepterait-on, des avenues Arthur de Gobineau ou maréchal Pétain, des lycées Xavier Vallat ou des rues Pierre Laval, des collèges Charles Maurras? Avec ce négationnisme tenace qui nie le martyre des Arabes, à quand le lycée général Massu, responsable, pendant la deuxième guerre d’Algérie, de la disparition de 3000 Algériens ? Autant que dans le Chili de Pinochet ! A quand le gymnase général Bigeard dont les techniques d'enlèvement, de torture et de disparition utilisées pendant la bataille d’Alger furent fidèlement reprises par les dictateurs d’Amérique du Sud dans les années 70 et 80 ? Que ces députés viennent raconter aux élèves le Code de l’indigénat qui porte en son sein la matrice des lois anti juives promulguées sous Vichy ? Des lois anti juives écrites, entre autres, par Peyrouton, garde des sceaux de Pétain, ancien haut fonctionnaire de la Coloniale, spécialiste de l’internement et de la déportation des Arabes. Antérieur de 59 ans aux lois anti juives puis contemporaines de ces dernières, ce Code de l’indigénat ne figure nulle part dans les programmes d’Histoire. Ce négationnisme, parmi tant d’autres, a conduit Aimé Césaire, poète et écrivain antillais à écrire : "Il vaudrait la peine d'étudier cliniquement…les démarches d'Hitler et de révéler au très distingué, très humaniste, très chrétien bourgeois du XX siècle qu'il porte en lui un Hitler qui s'ignore… et qu'au fond, ce qu'il ne pardonne pas à Hitler, ce n'est pas le crime en soi, le crime contre l'homme, ce n'est pas l'humiliation de l'homme en soi, c'est le crime contre l'homme blanc… et d'avoir appliqué à l'Europe des procédés colonialistes dont ne relevaient jusqu'ici que les Arabes d'Algérie, les coolies de l'Inde, et les Nègres d'Afrique." Dans certaines régions d’Algérie, les Arabes, hommes, femmes et enfants, ont été systématiquement massacrés par centaines de milliers, comme le furent les Indiens d'Amérique. Pour le Grand Dictionnaire Terminologique, cette « destruction délibérée et systématique de l'ensemble ou d'une partie d'un groupe national, ethnique, racial ou religieux » s’appelle tout simplement un génocide... Les Arabes ont besoin comme les autres, comme tous ceux qui ont été victimes de racisme et de génocide, d’être reconnus dans leur souffrance, dans leur martyre. Le pays qui se réclame des Droits de l’Homme serait bien inspiré d’illustrer ce devoir de mémoire par des commémorations à portée universelle. Des cérémonies qui ne se limiteraient pas à la seule description de l’horreur, mais qui poseraient la question: comment des humanistes, bons pères de famille, soucieux du bonheur de leurs enfants et de leur épouse …comment ces bons Français ont pu ainsi torturer, massacrer méthodiquement des centaines de milliers de familles? Comment ces hommes ont-ils pu se transformer en bourreaux? Comment ont-ils pu exterminer l’Autre, non pas pour ce qu’il avait fait mais pour ce qu’il était. Massacre de populations civiles, enlèvement, torture, disparition, famine organisée, génocide, toutes ces pratiques coloniales ont préparé l’ensauvagement du continent européen. Un pas restait à franchir pour les appliquer à l’Europe. Cela fut fait par Hitler qui, comme le rappelle Aimé Césaire, osa utiliser à l’égard d’autres Européens « des procédés colonialistes dont ne relevaient jusqu'ici que les Arabes d'Algérie, les coolies de l'Inde, et les Nègres d'Afrique." Malheureusement, là aussi, on débusque un autre négationnisme. En effet, Hitler était loin d’être seul, il était le produit d’un système effroyable mis en place, avant et pendant la guerre, en collaboration étroite avec des banquiers et industriels, non seulement allemands mais aussi français et américains. Là aussi, le négationnisme a fait des ravages dans l’esprit de nombreuses générations, en faisant que ne soient jamais cités dans les manuels scolaires les noms de certains grands patrons…des Français comme François de Wendel président du Comité des Forges, initiateur, bien avant 1939, d’un cartel international de l’acier qui attribua 40% des parts à une Allemagne acquise à l’idéologie nazie, des Américains comme Henry Ford, décoré en 1938 de l'ordre allemand de l'Aigle (la plus haute distinction nazie remise à un étranger), Hitler avait d'ailleurs utilisé pour sa propagande Le Juif international, livre viscéralement antisémite écrit en 1920 aux USA par ce même Henry Ford. Des Américains, comme le grand-père du président Bush, Prescott Bush, banquier de Hitler dans les années 30 et qui, en 1942, fut condamné par un tribunal américain pour intelligence avec l’ennemi. Les noms de General Motors, de Kodak, de ITT, de Standard Oil et bien d’autres encore…sans lesquels, jamais Hitler n’aurait pu réarmer l’Allemagne nazie. Sans oublier IBM qui mit, contre espèces trébuchantes, ses cartes mécanographiques au service des nazis, cartes perforées sans lesquelles le recensement n’aurait jamais pu prendre une telle ampleur, sans lesquelles, jamais autant d’opposants et de Juifs n’auraient été fichés et déportés en si grand nombre. En 1938, Hitler reconnaissant, décora en personne Watson, le président d'IBM ainsi que le représentant de General Motors, pour service rendu à l'Allemagne nazie...Ce qui fit dire, en 1947, à James Stewart Martin, chef de l'Economic Warfare Section du ministère de la Justice US: « En Allemagne, ce ne sont pas les hommes d'affaires allemands qui nous ont tenus en échec [...] Nous avons été bloqués en Allemagne par les hommes d'affaires américains.» Sur cette période de l’Histoire comme sur bien d’autres, le négationnisme occulte fréquemment des parts de vérité. Un négationnisme entretenu consciemment ou inconsciemment à tous les niveaux, et jusqu’au président de la République qui considère que «La France doit être fière de son passé». Des pans entiers de notre Histoire sont ainsi niés, passés sous silence. Dans nos sociétés, la finalité de l’enseignement de l’Histoire est de légitimer le pouvoir en place par l’intégration des élèves dans un roman national. Une réécriture non négationniste des programmes est inéluctable. Ne laissons pas ce travail à nos enfants. Il en va de la responsabilité du ministre de l’Education Nationale et de l’Inspection générale. Dans ce climat délétère d’une Histoire défigurée, génératrice d’irresponsabilité collective, le risque est grand de voir des jeunes se transformer demain, en assassins assermentés par impuissance de conscience. Nantes, le 7 mars 2005
Alain Vidal, professeur des Ecoles
Bibliographie, principales sources : -Coloniser Exterminer (Fayard), Olivier Le Cour Grandmaison, professeur de sciences politiques et de philosophie politique à l’Université. -Comment les firmes US ont travaillé pour le Reich ? Pierre Abramovici (Revue Historia)
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Plume
Manchot
Ragondin de Hongrie Russe
se lib?rer de la tranquillit?...
Posts: 223
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Post by Plume on Apr 14, 2005 12:53:49 GMT -5
Et vous ? Je suppose que vous êtes d'accord, mais qu'en dites vous ?
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Post by Ornella on Apr 19, 2005 7:42:07 GMT -5
Que vouloir enseigner des contre-vérités historiques dans l'école de la République n'est pas à la gloire de la France!
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Post by Kalys on Apr 20, 2005 4:29:59 GMT -5
[Kalys, fouteuse de merde. Pardon]
Hum, oui, je me demandais, est-ce que c'est vraiment une contre vérité? Je veux dire, peut-être que d'un point de vue économique la colonisation a eu quelques bienfaits? Ce qui serait une contre vérité, ce serait de n'enseigner que les points positifs, mais faire comprendre que la trame du monde est plus complexe qu'on ne le pense, ça ne serait pas bien?
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Post by Doudou on Apr 20, 2005 4:49:41 GMT -5
Non, je pense que cette décision est grave. Elle a été voté à l'initiative de députés du sud-est à des fins électoralistes, car la communauté pied-noir y est très importante et je ne pense aps que cette communauté est une vision objective de la colonisation, il faut se méfier avec ce genre de manips, une étude a été menée pour comprendre le fort vote d'extrême-droite dans le sud-est il en resort un malaise au sein de cette commuanuté pied-noir avec le FN qui joue avec le passé colonial. Partout ou on joue avec le passé on récolte du nationalisme (Alsace, Autriche, ex-RDA, Japon....).
Le point de vue de Vidal-Naquet sur le problème est intéressant.
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Post by Ornella on Apr 21, 2005 11:17:34 GMT -5
Des bienfaits ? Peut-être, mais qui sait si ces peuples ne se seraient pas mieux porter sans notre intervention ? On ne refait pas l'histoire... Du point de vue économique, le développement a surtout profité aux métropoles (et à quelques élites locales, car commme dans tout système de domination, il faut un certain consentement des dominés pour que cela fonctionne), qui ont imposé de force leurs structures économiques à des populations qui y étaient totalement étrangères et qui ne leurs avaient d'ailleurs rien demandé. Ainsi, à leur indépendance, ces pays se sont retrouvés dans de grandes difficultés quand il afallu gérer cet héritage. Certains ne s'en relèvent toujours pas ! Le problème est le point de vue depuis lequel on se place pour étudier la question, bien souvent ethnocentrique (mais est-ce évitable ?) tant il nous apparaît évident que le développement économique à l'occidentale est un bienfait (alors même qu'il peut aussi faire des révéges, chez nous comme à l'étranger). On ne peut pas non plus comparer le système colonial à un système sans colonies. Cela dit, je pense personnellement qu'il serait tant de reconnaître tout fait colonial comme un crime contre l'humanité : en effet, de quel droit peut-on imposer sa volonté à un autre peuple ? Cela relève d'une question de principe, à la limite, peut importe le nombre de morts ou les conséquences positives ou nagatives d'un fait historique, que nous n'avons d'ailleurs pas à juger en ces termes (ce type de problématique bien/mal, noir/blanc est d'avance biaisé en histoire, nous sommes d'accord). Sinon, je pense que Doudou a raison.
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Post by Yavine on Apr 21, 2005 12:27:15 GMT -5
Des bienfaits ? Peut-être, mais qui sait si ces peuples ne se seraient pas mieux porter sans notre intervention ? On ne refait pas l'histoire... Si, bien sûr que c'est possible ! C'est même extrêmement facile : il suffit de gagner une guerre... N'est-ce pas connue que ce sont les vainqueurs qui écrivent l'histoire ? Il faut enseigner très tôt aux jeunes à prendre les manuels d'histoire avec des pincettes, et je pense que la plupart des profs d'histoire sont capables de le leur enseigner -- surtout s'ils y voient des énormités, comme par exemple, au hasard, sur le colonialisme. Finalement, cette loi pourrait avoir un résultat autre que celui escompté, enfin peut-être. Ca dépend si la qualité des profs d'histoire baisse autant qu'en anglais, en maths, etc. Bizzzzzzz Yav', positiviste ;D
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